Merci, Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
Mesdames et Messieurs les députés,
Quelques mots en complément de ce que vient de dire le Président Juncker.
Les négociateurs britanniques nous ont fait part de leurs propositions et, avec leur propre équipe, qui est une équipe compétente et professionnelle, ils s’efforcent de nous les expliquer et de les clarifier au cours de plusieurs réunions techniques ces derniers jours.
o Pour dire les choses simplement et franchement, avec objectivité, au moment où je vous parle, nous ne sommes pas au point de trouver un accord.
o Pourtant, le temps presse. Nous sommes désormais à une semaine du Conseil européen et à quelques jours de cette date du 31 octobre qui a été agréée avec le précédent gouvernement pour la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne dans une forme ordonnée qui vaut beaucoup mieux qu’une sortie désordonnée
Les propositions britanniques soulèvent trois problèmes majeurs.
Le premier point concerne la question de la frontière, et le contrôles sur les biens sur l’Ile d’Irlande.
Le gouvernement de M. Johnson a rejeté dès son arrivée le backstop, qui est une sorte d’assurance ou de filet de sécurité sur lequel nous nous étions entendus avec le gouvernement de Theresa May C’est un fait.
Dans le même temps, le Premier ministre reconnait qu’un alignement règlementaire pour les biens est indispensable entre l’Irlande du Nord et l’Union européenne, et nous sommes d’accord sur ce point.
En revanche, pour résoudre le problème de contrôles douaniers, le Royaume-Uni propose tout simplement que nous prenions ensemble un engagement juridique pour éviter « en toutes circonstances des contrôles douaniers et règlementaires ou toute infrastructure physique à la frontière entre l’Irlande et l’Irlande du Nord ».
Nous partageons évidemment cet objectif, qui est l’un des objectifs du backstop, mais ce qui nous est demandé en réalité, c’est d’accepter un système qui n’est pas développé, qui n’est pas testé, de contrôles dispersés sur l’Ile d’Irlande, système qui reposerait largement sur :
o des exemptions et des dérogations au code douanier européen,
o des technologies qui restent à développer
o des changements au droit international prévu par le Common Transit Convention
o un système de « compliance » nouveau, mais sans les garanties prévues par le Protocole.
Nous avons besoin, à chacune des limites du marché unique et de notre Union douanière, de contrôles douaniers et réglementaires sérieux et rigoureux.
En Irlande, comme partout ailleurs, nous avons besoin de contrôles opérationnels, réels, crédibles.
C’est la crédibilité du marché unique qui est en cause, et donc la crédibilité vis-à-vis des consommateurs, des entreprises et des pays tiers avec lesquels nous avons des accords.
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Le deuxième point concerne l’exigence de trouver des solutions juridiquement opérationnelles.
Avec le Protocole, nous avons établi un filet de sécurité qui clarifie le régime applicable sur l’ile d’Irlande. Ce filet de sécurité est juridiquement opérationnel, puisqu’il s’appliquerait jusqu’à ce que nous trouvions une solution alternative.
En proposant de supprimer ce filet de sécurité et de chercher des solutions alternatives pendant la période de transition – c’est-à-dire plus tard, la proposition britannique ne nous donne pas la sécurité du Protocole.
- Un exemple : il n’y a pas dans cette proposition britannique de solution réelle pour les petites et moyennes entreprises sauf de proposer une dérogation générale.
- Deuxième exemple : que se passerait-il si le Joint Committee, auquel les Britanniques veulent renvoyer toutes les questions sans réponse pour l’instant, ne trouvait pas d’accord pendant la transition ?
Selon les propositions britanniques, la solution dépendrait alors de l’adoption de mesures unilatérales à prendre par le Royaume-Uni ou par l’Union européenne.
Il y aurait alors un risque significatif pour l’intégrité du marché unique, puisque les propositions britanniques nous engageraient en même temps à ne jamais prévoir de contrôles à la frontière entre l’Irlande et l’Irlande du Nord, qui deviendront deux juridictions différentes.
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Le troisième point de désaccord concerne la proposition britannique sur le « consent ».
Nous avons toujours regretté l’absence de Stormont depuis deux ans et demi pour donner une voix solide et forte nord-irlandaise dans nos négociations.
Dans le Protocole existant, nous avons prévu avec les Britanniques des mécanismes qui permettent la représentation de l’Irlande du Nord.
Nous sommes prêts à examiner des idées nouvelles pour un rôle plus important pour les institutions nord-irlandaises dans la mise en œuvre du Protocole, dans le respect du Good Friday/ Belfast Agreement.
Mais, aujourd’hui, la proposition britannique consiste à conditionner la mise en œuvre du Protocole à une décision unilatérale des institutions d’Irlande du Nord qui pourraient décider :
o Dès le départ, au lendemain de la ratification de l’accord de retrait, de ne pas activer la solution proposée pour l’Irlande du Nord
o Et, si elle était quand même activée, tous les quatre ans, de la remettre en cause cette solution.
La proposition du gouvernement britannique, telle qu’elle est, et que nous ne pouvons pas accepter, remplacerait une solution opérationnelle, pratique, légale, par une solution hypothétique et provisoire.
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Enfin il y a un quatrième point qui ne concerne pas l’accord de retrait mais la déclaration politique, qui décrit la future relation que nous devrons reconstruire dans tous les domaines, qu’il y ait un accord ou pas d’accord.
Aujourd’hui, M. Johnson nous demande de nous concentrer pour l’avenir de notre relation économique seulement sur un accord de libre-échange basique et pas sur d’autres options que nous avions laissées ouvertes dans la déclaration politique et il nous demande aussi de supprimer les références que nous avions agréés avec Theresa May sur un point très important qui est le level playing field, c’est-à-dire une règle du jeu de base, un socle de règles en matière fiscale, d’aide d’Etat, de droits sociaux, de droits environnementaux, de droits des consommateurs.
Et donc nous sommes face à cette demande qui laisse entrevoir le risque pour nous, avec un accord de libre-échange basique, de faire face à une compétition réglementaire, voire à un risque de dumping fiscal, social ou environnemental que nous n’accepterons pas.
Voilà pourquoi je dis que l’ambition et le niveau de notre futur accord de libre échange avec le Royaume-Uni sera proportionnel aux niveau des engagements pris pas les autorités britanniques durablement pour une règle du jeu commune.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Personne à Londres ou ailleurs ne doit s’étonner que l’Union s’attache dans cet accord de retrait à obtenir des solutions opérationnelles, juridiquement solides et durables.
Car le Brexit crée des problèmes concrets, précis, graves, notamment en Irlande.
Face à ces problèmes immédiats, nous avons besoin aujourd’hui, et pas demain, de solutions précises, opérationnelles, légalement contraignantes pour les deux parties.
Dans ce moment grave et important, nous resterons de notre côté, comme toujours, calmes, vigilants et constructifs en même temps que nous resterons respectueux du Royaume-Uni et de ceux qui le dirigent.
Nous restons, avec mon équipe et en permanente coopération avec le Parlement européen et l’ensemble des Etats membres, disponibles 24 heures sur 24, dans les jours qui viennent.
C’est dans cet esprit que je rencontrerai à nouveau demain le ministre britannique Steve Barclay et, dans le respect scrupuleux du mandat qui nous a été confié par le Conseil européen et des résolutions du Parlement européen, nous allons continuer à travailler.
Même s’il est très difficile, s’il y a de la bonne volonté des deux côtés, un accord reste possible avec les Britanniques.
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